31 décembre 2017
Sommes-nous pro- ou anti-américains ? Pour Régis Debray, l’Amérique est une civilisation, qui, comme toutes les civilisations, s’étend et installe sa suprématie partout où elle mène ses conquêtes. Il montre en effet comment l’Europe, qui fut une civilisation, est devenue une culture sous l’emprise de l’empire américain. Elle l’est, non seulement dans l’utilisation des mots et des termes anglais (managers, disc-jockey, sampling, pure players, team building…) mais aussi dans les institutions et les comportements. Nous avons une First Lady. Le PS planche sur la société du care. L’université adopte le modèle graduate et post graduate et recommande le PhD à la place du doctorat d’État. À Sciences Po 60% des enseignements se font en anglais et l’on a des visiting professors. On pratique les class actions et le name dropping. Les majorettes ouvrent les défilés. Le bien-être et le développement personnel sont au centre de la gestion des entreprises. Nous recevons des newsletters. iTélé est rebaptisée CNews… Alors, sommes-nous devenus américains ? Et l’Europe n’aurait-elle plus rien à dire ? Ne serait-elle plus qu’une « entreprise sans passion motrice » et ses institutions ne fonctionnent-elles qu’à l’anglais ? Finalement, Régis Debray laisse percer un brin d’optimisme. C’est lorsqu’une civilisation touche à sa fin et reprend les couleurs d’une culture que les talents s’épanouissent, comme dans la Vienne du début du 20ème siècle. Ainsi, l’Europe « déjà bien américanisée » ne meurt pas mais se transforme, sans perdre son âme.
Un livre passionnant, érudit et drôle à la fois. À mettre entre toutes les mains.
Civilisation. Comment nous sommes devenus américains, Régis Debray
Gallimard – Avril 2017