« Le cas Richard Jewell » : Seul contre tous

2 Mars 2020

Le cas Richard Jewell, le dernier film de Clint Eastwood ne déroge pas à ses obsessions. Il est encore ici question de héros ordinaires face à des situations extraordinaires comme dans ses récents films Sully (2016) ou La Mule (2018). L’agent de sécurité, Richard Jewell (Paul Walter Hauser), respectueux des lois et de l’ordre, rêve de devenir un grand policier car, comme lui dit sa mère Bobi (Kathy Bates), il « est encore un bon gars prêt à chasser les méchants ». Lors d’un concert dans le Parc du Centenaire d’Atlanta, il découvre un colis suspect. Il prévient la police, fait évacuer la foule et permet ainsi d’éviter le massacre que l’attentat aurait pu déclencher. Immédiatement, les médias vont en faire un héros national. Il est célébré. Tout le monde le salue. Il passe à la télévision… Mais, et c’est ici qu’intervient l’art de Clint Eastwood, le déroulement du film change de trajectoire : le héros devient suspect. Les médias et le FBI l’accusent d’avoir lui-même posé la bombe. Là où il rêvait d’ordre et de reconnaissance, voici que le monde s’abat sur notre agent de sécurité, transformant sa vie en calvaire, broyé par les puissances institutionnelles. Les journalistes ne le photographient plus comme une star, mais l’épient. Une série de plans se font face judicieusement montrant la confrontation entre Richard et sa mère consternés, barricadés dans leur appartement et la meute de journalistes dans la rue, vindicative, qu’on aperçoit à travers les stores. Intérieur sombre et silencieux ; extérieur éclairé et bruyant. Intérieur, solitude individuelle ; extérieur, domination institutionnelle. Magnifique moment de cinéma.
Les accusations et les humiliations font feu de tout bois. Clint Eastwood les décrit avec force caricature. La journaliste Kathy Scruggs (Olivia Wilde) est prête à toutes les bassesses pour arriver à ses fins : faire un scoop sur la culpabilité de Richard. Et en effet, c’est dans un bar à l’ambiance sombre qu’elle séduit l’agent du FBI en échange de l’information. Quant à l’agent du FBI Tom Shaw (Jon Hamm), c’est un summum de cynisme et de manipulation grotesque et ridicule. Humiliation encore que le défilé des cartons et des ustensiles personnels de Bobi que l’on emporte, puis plus tard que l’on rapporte et que Clint Eastwood traite avec humour pour bien signifier comment le FBI viole l’intimité de Richard et de sa mère.
Mais avec l’aide, la défense et l’humour de son avocat, Watson Bryant (Sam Rockwell), le procureur finira par reconnaitre qu’il n’y a aucune preuve de la culpabilité de Richard. L’émotion est à son comble quant Bobi, la mère de Richard, les larmes aux yeux, défend l’innocence de son fils lors d’une conférence de presse organisée par Watson. La caméra d’Eastwood décrit alors un travelling circulaire et vient se poster devant le visage en larmes de la journaliste. C’est là sa rédemption avec celle de Richard Jewell. Dans sa diatribe contre les institutions américaines, Clint Eastwood magnifie la force et l’autonomie de l’individu. Il reste malgré tout un grand optimiste pour qui le rêve américain est encore d’actualité.

Le cas Richard Jewell
Clint Eastwood
USA 2019
Avec Paul Walter Hauser, Sam Rockwell, Kathy Bates, Jon Hamm, Olivia Wilde
En salles depuis le 19 février 2020
Disponible en DVD et Blu-ray

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